La religion

Définitions

La religion : ensemble de croyances, rituels, dogmes, qui conduisent le rapport de l’homme à la divinité. Deux étymologies possibles : le latin religare = relier (la religion relie l’homme à Dieu), ou religere = recueillir. Complexe parce qu’elle mélange plusieurs dimensions : une dimension subjective (système organisé autour de croyances) et collective (ensemble d’individus regroupés autour de pratiques, cohésion). L’homme est mis en relation avec une entité jugée supérieure. 

Croyance/foi : croire sans avoir besoin de preuves. La foi vient du latin fides = confiance. Donc le fidèle, c’est celui qui a la foi parce qu’il a confiance en Dieu.

Dogme : préjugé

Y a-t-il un lien entre raison et religion ?

La croyance et la foi s’opposent à la vérité. Celui qui croit, qui a la foi, ne croit pas parce qu’il a eu une preuve scientifique. Croyance et foi se passent de preuves, de raison. La foi suppose un engagement défiant la logique et la raison. La religion n’a pas à exiger des preuves rationnelles et la science n’a pas à être mise sous tutelle d’une religion.

Pascal met en valeur le caractère incompatible de la raison et de la religion : la foi ne peut pas faire l’objet d’un raisonnement, le croyant n’a pas besoin de preuves ; et la science ne peut pas être influencée par les croyances. Il faut donc séparer raison et religion. C’est pourquoi certains récits fondateurs peuvent sembler injustes, comme le récit du péché originel d’Adam et Eve : Dieu punirait tous les hommes pour une faute que seuls deux d’entre eux ont accomplie. Mais Dieu n’est pas injuste, en réalité cette contradiction est un mystère qui doit être accepté parce qu’il est révélateur de notre condition d’êtres mortels, de « roseau([x] pensant[s] » : l’homme a un corps fragile mais se caractérise par sa raison et sa conscience. 

Pour Russel, science et religion s’opposent en tant que la science repose sur des vérités prouvées et démontrées, alors que la religion repose sur une croyance non démontrée. De plus, la science est limitée : elle ne peut pas tout connaître, et certains savoirs  tenus pour vrais seront falsifiés suite à des expériences plus poussées. Au contraire, la religion détient une vérité définitive et qui ne sera jamais remise en question.

« Un credo religieux diffère d’une théorie scientifique en ce qu’il prétend exprimer la vérité éternelle et absolument certaine, tandis que la science garde un caractère provisoire : elle s’attend à ce que des modifications de ses théories actuelles deviennent tôt ou tard nécessaires et se rend compte que sa méthode est logiquement incapable d’arriver à une démonstration complète et définitive. » RusselScience et Religion.

 

Mais nous pouvons trouver des objections.

Averroès va mettre en valeur que la foi et la raison sont toutes les deux des expressions de la vérité. Et si ces deux vérités ont un avis contradictoire sur le même phénomène, il faut interpréter le texte sacré de telle sorte à ce qu’il s’accorde avec la raison. Donc on a besoin de la raison pour interpréter le religieux !

De plus, les philosophes des Lumières veulent rendre la religion rationnelle, en critiquant les dogmes absurdes. Voltaire veut fonder une morale universelle débarrassée des dogmes irrationnels. Il ne s’agit pas de nier l’existence de Dieu, mais de rendre la religion plus rationnelle. L’homme aurait projeté des dieux aux caractéristiques humaines dans l’au-delà.

Rousseau : ce qui pose problème est la séparation entre raison et religion, c’est cela qui est à l’origine des conflits divisant les hommes. En effet, la nature témoigne de la toute-puissance de Dieu : l’homme n’a pas besoin d’intervenir et de chercher à transmettre un message divin, qui ne ferait que dégrader Dieu en lui attribuant des passions humaines. La raison reconnaît que la nature est l’oeuvre de Dieu et est un message divin. Quand l’homme cherche à s’immiscer dans ces révélations, il fait dire à Dieu ce qu’il veut, ce qui fait naître des contradictions et des différences entre les religions, et cela occasionne donc des conflits. Alors que si l’homme écoute sa raison et ne s’immisce pas dans les messages divins, il n’y aurait qu’une religion, non conflictuelle, celle du coeur, qui a la foi et qui croit !

L'homme a-t-il besoin de la religion ?

Pour Hegel, la religion existe parce que le croyant cherche à donner un sens à un phénomène qui touche l’existence humaine.

Freud : la religion répond à un besoin psychologique de l’homme qui prend conscience de sa finitude, mais c’est une illusion car cela exprime simplement des désirs ressentis durant l’enfance : désirs de protection, de justice, et de donner un sens à son existence. Quand on est enfants, l’autorité paternelle suffit à satisfaire ces désirs. Mais quand on grandit, on a besoin d’une figure ayant plus d’autorité pour répondre à ces derniers, et c’est Dieu.

« Les idées religieuses […] sont la réalisation des désirs les plus anciens, les plus forts, les plus pressants de l’humanité ; le secret de leur force est la force de ces désirs. […] L’angoisse humaine en face des dangers de la vie s’apaise à la pensée du règne bienveillant de la Providence divine. […] Et c’est un formidable allègement pour l’âme individuelle que de voir les conflits de l’enfance émanés du complexe paternel – conflits jamais entièrement résolus – lui être pour ainsi dire enlevés et recevoir une solution acceptée de tous. » Freud, L’Avenir d’une illusion.

Marx : si la religion est « l’opium du peuple », c’est parce que le peuple a besoin d’une drogue qui prend la forme d’une croyance qui va l’endormir et le rassurer. L’endormir, parce qu’ainsi en leur faisant croire et espérer en un monde meilleur après la mort, les capitalistes parviennent à contenir et empêcher les rébellions d’un peuple surexploité, ils parviennent à leur faire tolérer et supporter leur situation actuelle. Le rassurer, parce que le peuple a besoin d’une croyance pour être réconforté quant à un phénomène qu’il ne connait pas et qui est source d’angoisse : la mort, et ce qui se passe après. La religion est donc un réconfort illusoire, mais aussi un instrument pour la classe dominante, qui l’utilise pour justifier les souffrances des prolétaires et leur faire miroiter un futur radieux.

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